31/12/2010 à 01h03
Trois films pour un King Kong


King Kong



Comparaison des trois principales versions cinématographiques.





Version 1933


Réalisateur : Ernest B.Schoedsack et Merian C.Cooper.

Réalisé dans le contexte difficile de la crise de 1929, ce film de Cooper et Schoedsack invente un mythe exclusivement cinématographique.


En effet, Kong ne provient pas d'une création littéraire et ce mythe n'existait pas avant le film.


Les réalisateurs se sont cependant inspirés du film de 1925 « Le Monde Perdu » adapté d'un roman de Conan Doyle. Les créatures du « Monde Perdu » (des dinosaures et un grand singe) étaient animées par Willis O'Brien, le magicien des effets spéciaux que Cooper et Schoedsack embauchent à leur tour, et qui était considéré comme une référence par Hollywood dans le domaine des effets spéciaux.


L'animation image par image, malgré quelques imperfections, étonne encore aujourd'hui par sa précision, et fait sortir le film de la catégorie des séries B .

-Pour les gros plans, c'est une tête de singe articulée gigantesque qui fut utilisée. Il fallut quarante peaux d'ours et trois hommes pour piloter cet ensemble articulé.


-L'actrice principale Fay Wray porte une perruque blonde dans le film pour renforcer le contraste avec la bête.


Pour la convaincre de jouer dans son film, Cooper lui annonça qu'elle jouerait avec "l'homme le plus grand et le plus charismatique d'Hollywood". Celle-ci pensait tourner avec Clark Gable jusqu'à ce qu'elle voit les dessins de Kong accroché à l'Empire State Building.








-Les deux réalisateurs apparaissent dans le film en tant que pilote et mitrailleur d'un des avions qui tirent sur Kong. Il faut préciser qu'ils étaient aviateurs tous les deux.

-Quelques scènes furent coupées au montage par la censure lors de sa rediffusion américaine en 1938. En effet, à cette époque le Code Hays était appliqué rigoureusement et a fait disparaître la nudité et la violence du cinéma. Il s'agit notamment du plan où Kong déshabille Ann et semble ensuite respirer ses doigts (?). Heureusement pour le patrimoine cinématographique américain, ces scènes furent récupérées. Puis elles furent ajoutées en 1972 dans la version que nous connaissons aujourd'hui.


-Les réalisateurs ont dû faire preuve d'imagination pour contourner les difficultés financières. Des dessins préparatoires de célèbres illustrateurs (Mario Larrinaga et Byron Crabbe) ont été réutilisés. Ils ont également récupéré des décors qui avaient déjà servi dans d'autres productions de la R.K.O.





Le village fortifié de Skull Island est un décor qui avait été fabriqué pour un film de 1926, “Le Roi des rois” de Cécil B. DeMille et qui représentait la ville de Jérusalem. On y a simplement ajouté des sculptures indigènes et de la végétation. Ce même décor fut brûlé en 1938 pour simuler l'incendie d'Atlanta dans 'Autant en emporte le vent'.


Les ambiances sont partiellement identiques à celles des "Chasses du Comte Zaroff", grand classique tourné avec la même équipe un an auparavant. Les décors réalisés en peinture sur verre sont inspirés de magnifiques gravures du célèbre illustrateur français, Gustave Doré.

-En France, les critiques empêchèrent la diffusion du film à une large échelle. L'état d'esprit français est résumé dans un article :" ...il aurait fallu un homme de plus de talent pour nuancer ces tableaux de cauchemar... le sujet est d'une candeur enfantine, car les auteurs on évité au récit tout ce qui pouvait apporter un élément de pensée intéressant. Nous sommes en présence d'un conte puéril, à l'échelle de la mentalité américaine, qui ne s'embarrasse pas de soucis de philosophie ou d'ironie ", déclarait Emile Vuillermoz dans " Le temps " daté du 23 Septembre 1933.


Des critiques qui ont disparues dans les années 60, pendant lesquelles le film fut réhabilité en France.


-La suite du film (Le fils de Kong 1934), n'eut pas le même succès. Le film montre encore une fois le talent d'O'Brien pour l'animation. Le scénario, involontairement comique et l'action peu maîtrisée n'ont pas permis à ce film de rencontrer le public aussi largement que le premier opus.






Version 1976


Réalisation : John Guillermin







Un remake dont l'action se situe dans les années 70.

Jessica Lange, qui joue le rôle de Dwan (le prénom de la femme enlevée par Kong était Ann dans la version 1933). Elle reçu le Golden Globe de la révélation féminine de l'année 1977.


Même si cette grosse production n'est pas restée dans les mémoires, on peut quand même noter son rôle dans la renaissance d'un mythe resté longtemps oublié.


Le singe n'est pas le résultat d'une animation, mais la mise à l'échelle d'un homme en costume de gorille.


Dans le King Kong de 1933, le grand singe reconnaît dans l'Empire State Building sa montagne disparue.


Dans cette version, il s'agit du World Trade Center. Suite à ce changement, des employés de l'Empire State Building exprimèrent leur mécontentement vis à vis de la décision des producteurs en faisant grève, déguisés en singe. L'Empire State Building apparaît cependant à l'arrière-plan sur l'affiche du film.


Longtemps, ce film a eu la réputation d'être un échec commercial. Le nombre d'entrées en 1976 fut en effet assez faible. En fait, il est sorti à la fin de l'année, et la plupart des recettes ont été enregistrées en 1977.


 


Version 2005
Réalisation : Peter Jackson











Le film est un remake explicite et fidèle du King Kong sorti en 1933. Le contexte historique des années 30 est donc respecté. Il est même question de la crise de 1929 (alors que le premier film n'en faisait pas état explicitement). Les puristes noteront quand même quelques différences notables par rapport à l'idée de départ. Suivant la même trame scénaristique, sa durée est presque double : 3 h, contre 1 h 40.

-Le tournage a débuté juste un mois après le décès de l'actrice Fay Wray qui avait joué dans le premier King Kong et qui après avoir rencontré Peter Jackson avait été d'accord pour faire une apparition et prononcer la réplique finale.


Dans le film, Carl Denham demande à son assistant de lui trouver l'actrice principale du film. Pensant engager Fay Wray, il apprend que cette dernière est déjà engagée sur un autre film.


Denham prononce alors le nom de Cooper (un des réalisateurs du premier King Kong), puis on entend une musique du film de 1933.


Si bien que pendant que Denham tourne son film et vit ses aventures, P. Jackson nous fait comprendre que Cooper tourne son King Kong !


-Le film tient surtout grace à la performance de Naomi Watts, pleine d'initiative, visiblement émue par son ravisseur.




-Le gorille fut numérisé à partir d'une interprétation d'Andy Serkis. C'est ce même procédé qui avait été utilisé pour donner vie à Gollum dans Le Seigneur des anneaux, lui même joué par Andy Serkis. Andy Serkis joue également le rôle de Lumpy, le cuisinier du bateau.


-Quand Carl Denham filme Bruce Baxter et Ann Darrow sur le pont du bateau au début du film, la mise en scène est identique à un passage de la version de 1933 entre Ann et Jack Driscoll.

-Après la capture de Kong sur la plage, Denham ressort une réplique du film de 1933:


"The whole world will pay to see this! We're millionaires, boys! I'll share it with all of you. In a few months, his name will be up in lights on Broadway! KONG, THE EIGHTH WONDER OF THE WORLD!"


"Le Monde entier voudra payer pour voir ça ! Nous sommes millionnaires ! Je partagerai avec chacun d'entre vous. Dans quelques mois, son nom sera affiché dans Broadway ! KONG, LA HUITIEME MERVEILLE DU MONDE !"


-Une publicité pour Universal Pictures est visible alors que Kong se trouve à Times Square.


Dans le film original, une affiche publicitaire pour Columbia Pictures apparaissait au même endroit, la production l'a donc reproduite, mais Columbia a demandé une forte somme d'argent pour en autoriser la diffusion, elle a donc été remplacé par l'équipe des effets spéciaux.


-Dans le film de 2005, Peter Jackson joue le rôle d'un des mitrailleurs sur un avion; Le pilote est joué par Rick Baker, qui joua Kong (dans un costume) dans le remake de 1976. C'est bien sûr un clin d'œil à la présence des réalisateurs Cooper et Schoedsack dans le cockpit d'un des avions du film de 1933.





La réplique de fin du film

Les trois films ne se valent pas, et certains inconditionnels ne jurent que par celui de 1933 qui a initié un genre fantastique. Des histoires de créatures, sorties de leur milieu naturel mues par leurs instincts et qui vont provoquer une catastrophe. "Alien", "The Host" ou "Cloverfield" en sont des exemples. Ces histoires ne nous apprennent pas grand chose sur le comportement des grand singes, mais font écho à nos peurs, notre ambition démesurée mais aussi à notre capacité empathique. En somme, Kong est le révélateur de sentiments humains qui restent souvent cachés derrières les conventions, comme ces barrières qui retenaient le singe à l'intérieur de Skull Island.



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