date: lundi 25/10/1982 (6 ans) lieu: Colombes
Depuis le début de l'année scolaire, je me découvre une allergie aux mathématiques. Je dois apprendre les tables de multiplication. Ce qui me terrifie le plus, ce sont les exercices de vitesse. Il s'agit d'écrire le résultat de la multiplication de deux chiffres annoncés par la maîtresse, sur notre ardoise, et le plus vite possible. Plus d'une fois, je suis obligé de copier sur mes voisins pour arriver à suivre le rythme. Pourtant, tout le monde a l'air de trouver ça facile. J'ai beau les réciter, demander de l'aide, je n'y arrive pas. On me donne quelques astuces: essayer de les chanter, utiliser des images pour les retenir,... Rien n'y fait, je ne me souviens que des tables les plus simples (de 1 à 5). « -Combien font 2 x 2 ? - 4 -Combien font 6 x 7 ? -48 ? ». Je tombe toujours dans le panneau à partir du chiffre 6. En plus, j'arrive parfois à retenir le résultat dans un sens, et pas dans l'autre (6 x 8 ou 8 x 6 étaient deux calculs complètement différents pour moi). Ma plus grande hantise: 7 x 8. Avec ces deux chiffres là, je n'ai aucun repère, contrairement aux chiffres plus petits, ou de la table de 9 qui semble obéir à une loi plus logique (9 x 6 = 60-6 = 54). Comme je semble hermétique aux maths, malgré les efforts de mes parents et de mon institutrice, je me dit qu'il faudra attendre d'avoir une calculatrice pour renouer avec cette matière dangereuse, dans laquelle il semble obligatoire d'exceller. J'étais fasciné par cette petite machine marron, que ma mère utilisait pour faire ses comptes, et qui semblait beaucoup plus capable que moi d'arriver à retenir ces fichues tables. Parfois, je me suis dit que j'étais vraiment trop bête. Plus tard, j'ai pensé qu'on ne m'avait probablement pas appris ces tables avec la bonne méthode, ou que j'avais une mauvaise mémoire. (écrit le: 2012-10-08) catégorie: scolarité - année: 1982
date: lundi 03/09/1984 (8 ans) lieu: Colombes
Dur de retourner à l'école après deux mois de vacances. Avec des copains, les choses sont plus faciles. Jean, Guillaume, Pacôme et Mickaël sont mes plus proches amis. Du point de vue scolaire, je bute sur les multiplications. Même en chantant la table des multiplications, je n'arrive pas à la retenir. J'ai malgré tout l'impression de faire partie des bons élèves de la classe. A la récréation, nous fabriquons des avions en papier. Le but du jeu est les de faire tenir le plus longtemps possible en l'air. Après avoir marché dessus par mégarde, un de mes avions en papier est très abimé. Malgré tout, je plie le papier dans le bon sens et le lance. Par le biais d'un courant d'air opportun, mon avion fait deux tours de la cour, et finit par se poser délicatement. Je suis heureux. (écrit le: 2011-08-02) catégorie: scolarité - année: 1984
date: lundi 01/09/1986 (10 ans) lieu: St Leu la forêt
Ça y est, j'entre en 6ème. Je suis terrifié à l'idée d'aller au collège. Ce n'est pas tant le fait d'aller à l'école qui me gêne que d'arriver dans un groupe déjà constitué. Mes futurs camarades de classe étaient ensemble en CM2, moi j'arrive de nulle part. Le matin de la rentrée, je fais ma crise. Je me retient aux poignées des portes de l'appartement mais ma mère arrive quand même à me porter jusqu'à la sortie. Devant l'entrée du collège, on énonce les noms des élèves par classe. J'ai un pic de stress quand ils prononcent mon nom.
(écrit le: 2011-08-05) catégorie: scolarité - année: 1986
date: mercredi 01/10/1986 (10 ans) lieu: St Leu la Forêt
Comme tous les enfants de parents enseignants, je fais allemand première langue au collège. D'abord parce que nous avons des heures de cours en plus, ma mère sait que je suis en classe plutôt que dans la cours de récréation! Ensuite, c'est bien connu, les classes d'élèves qui font allemand en première langue sont meilleures que les autres. Me voici donc dans un groupe manifestement plus intelligent que moi. Comme je suis de la fin de l'année, j'ai en plus de cela un petit retard de croissance sur les autres. Je suis déjà à l'écart, du fait de ma timidité. Premier cours de langue vivante N°1. Mme Cazenave, une femme d'origine allemande, nous lit la première leçon du livre illustré qui nous a été confié au début de l'année, "Komm mit nach Deutschland". Stefen et Uwe, deux collégiens allemands, se rencontrent dans la rue. Ils se saluent, et se demandent tout simplement s'ils ne vont pas aller jouer au football sur le terrain de jeu (?). Notre professeur d'allemand met en route la bande magnétique audio. Il s'agit d'une mince bobine accrochée à une sorte de lecteur relié à un haut-parleur de couleur noire. "-Hallo Stefen -Hallo Uwe -Wohin gehst du ? - Auf den Spielplatz -Willst du Fußball spielen ? -Ja natürlich -Moment, ich komme auch !". Puis une flûte joue un petit morceau. La raison pour laquelle je m'en souviens encore, c'est qu'il fallait apprendre le dialogue par coeur. Tous les cours vont être basés sur des discussions virtuelles entre de jeunes élèves allemands. On apprend à conjuguer les verbes et à maîtriser la grammaire complexe de la langue de Goethe. Enfin, maîtriser c'est un grand mot... Le but de ces exercices consiste à noter notre application à faire la différence entre le datif et le gérondif, et à connaître le genre des noms propres qui traversent les discussions de "Stefen" et "Uwe". Nos évaluations sont entièrement basées sur des devoirs écrits dans lesquels on doit restituer ce que l'on a péniblement retenu. Ce n'est pas glorieux, mais à la fin de l'année, je ne savais toujours pas tenir une simple discussion sur la pluie et le beau temps en langue allemande. A de rares exceptions près, ceux qui ont appris l'allemand à l'école ne s'en servent jamais dans leur vie professionnelle. D'abord parce que les allemands sont très bons en langues étrangères, et ensuite parce que l'anglais s'est imposé en Europe comme langue "par défaut". Ce qui ne veut pas dire que ceux qui ont appris l'anglais dans une école française sachent le parler. On peut se demander d'une manière générale pourquoi le système éducatif français met l'accent sur l'écrit plutôt que sur l'oral. Combien d'élèves de troisième sortent du collège en sachant conjuguer les verbes irréguliers en anglais, mais seraient incapables à Londres de demander un « fish and chips » à un vendeur dans la langue de Shakespeare ?... (écrit le: 2012-07-01) catégorie: scolarité - année: 1986
date: vendredi 13/03/1987 (11 ans) lieu: St Leu La Forêt
Ma prof d'Histoire-Géographie Mme LAFONT me terrifiait. Elle nous demandait d'apprendre nos leçons par coeur, pour demander à un des élèves au hasard ce qu'il a retenu du cours précédent. Cette prof était parfois comparée à une flingueuse. Nous avions également appris que son mari était décédé pendant la guerre d'Algérie. Grace à elle, je peux encore aujourd'hui citer de mémoire le nom de tous les pays africains de l'ouest à l'est et du nord vers le sud... Cette fois-ci, elle nous avait demandé de noter sur notre cahier de texte de lui rendre une rédaction dont j'ai oublié le sujet. J'ai pris du retard, et je n'avais pas eu le temps de terminer alors que le cours commençait après le déjeuner. J'ai rédigé la fin du devoir sur mon plateau à la cantine. Le plat principal ce jour là était accompagné de pommes de terre à l'huile. Au moment de rendre ma copie, je me suis rendu compte que le papier était transparent, à cause de l'huile, mais il était trop tard pour tout réécrire au propre. Pour tout dire, j'étais sur le peloton d'exécution "C'est inadmissible, vous me rendez un torchon, j'ai honte pour vous (...)". Finalement, j'ai eu une punition, et je crois que je n'ai plus jamais rendu de copie salie ou tâchée de toute ma vie. (écrit le: 2011-07-22) catégorie: scolarité - année: 1987
date: lundi 07/11/1988 (12 ans) lieu: St Leu la Forêt
Par un concours de circonstances que je ne m'explique pas encore, les différents votes de chefs de classe depuis le début de l'année n'ont pas réussi à déterminer une majorité pour l'un ou l'autre des candidats. Cette année, j'avais décidé de me présenter, car mon père était chef de classe lui aussi. Au bout du cinquième vote, les deux élèves qui ressortent sont moi et ma camarade Kahina. Cette fille légèrement plus âgée que les autres élèves a toutes les qualités pour faire des compte-rendus du conseil de classe et porter les demandes des élèves auprès du professeur principal. Quant à moi, je n'ai aucune de ces compétences, et je dois avouer que je suis l'un des plus mauvais élève de la classe. Participer à la vie du collège sera tout de même une expérience enrichissante, même si je ne le méritais pas. (écrit le: 2011-08-11) catégorie: scolarité - année: 1988
date: samedi 18/02/1989 (13 ans) lieu: St-Leu-la-forêt
Un de mes amis au collège s'appelle Romuald. Il habite dans une maison avec sa mère et sa grande soeur à côté de l'école. Assez petit, avec ses grosses lunettes, il fait plus que son âge. On dirait qu'il a emprunté sa manière de parler à un grand-père. Ses vêtements d'un autre temps sentent un peu le renfermé, et il garde un mouchoir en tissu plié en boule au fond d'une des poches de son pantalon en velours côtelé. Je le trouvais gentil avec moi, ce qui n'était pas le cas de beaucoup de mes camarades de classe. Il était un des meilleurs élèves, en tout cas il était beaucoup plus intelligent que moi. On dirait aujourd'hui qu'il était un "geek". Nous sommes allés un week-end à la patinoire, car il y allait souvent faire du hockey sur glace. Sa soeur m'a appris à avancer à reculons avec des patins à cette occasion. Une fois rentrés chez lui, je me souviens qu'il m'a fait écouter une chanson sur son lecteur de cassette. Ça n'était pas du tout de la musique de son âge, on aurait dit du cor de chasse ou quelque chose dans le genre. Je l'ai répété à un autre élève de ma classe en sa présence, ce qui a beaucoup choqué Romuald. Il faut dire que j'ai tendance à traiter les gens que je connais de façon assez dure, peut-être car j'attends la même chose de leur part. Un copain qui ne vous dit pas tout est forcément un peu hypocrite. Les gens les plus seuls sont ceux qui disent toujours ce qu'ils pensent être la vérité. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas gardé beaucoup d'amis. Je le regrette aujourd'hui. (écrit le: 2013-12-15) catégorie: scolarité - année: 1989
date: mercredi 01/03/1989 (13 ans) lieu: St-Leu-la-forêt
Au collège, mes camarades de classe m'appellent « Penette », ils me connaissent comme ça. Il faut dire que mon nom composé est difficile à retenir. J'aurais préféré qu'ils m'appellent Florent. Mes notes sont souvent assez basses, mais je suis dans une classe dont le niveau est quand même assez élevé. Les professeurs se tournent souvent vers moi pour poser une question à quelqu'un « au hasard ». Ils essayent peut-être d'améliorer mon niveau en m'obligeant à répondre. Ma timidité rentre évidemment en ligne de compte pour choisir la personne à qui ils posent des questions. Étant donné qu'ils n'entendent pas souvent le son de ma voix, il faut bien qu'ils m'interpellent pour me faire réagir. "Comment appelle-t-on la droite passant par le centre et limité par les points du cercle ? Je choisis un élève au hasard... Penette". Comme je suis celui sur lequel tombe toujours le hasard, ma classe change mon surnom: je deviens « Au hasard, Penette ». L'explication est évidente, pour eux je dois forcément attirer la malchance. De même, il est facile de désigner quelqu'un, quand on ne veut pas faire une tâche ingrate: "Qui va chercher la balle, tombée dans le ravin ? Au hasard... Penette". Être le sujet de moqueries n'est jamais agréable. Tout les élèves ne me traitaient pas de cette façon, heureusement. (écrit le: 2013-12-15) catégorie: scolarité - année: 1989
date: mercredi 15/03/1989 (13 ans) lieu: St-Leu-la-forêt
Au collège, on s'ennuie un peu pendant la récré. Du coup, on joue à la pelote, avec une balle de tennis. C'est un jeu qui consiste à taper chacun son tour dans une balle: elle doit toucher le sol puis le mur. Si on laisse la balle retomber, on a perdu, et les autres continuent la partie. Le gagnant est celui qui reste à la fin et gagne le duel. On joue parfois à 6 personnes, devant un mur de 3m de large et on se bouscule énormément. A force de taper dans cette balle, on finit par avoir la paume de la main complètement tannée. On jouait partout où il y avait un mur, aussi petit soit-il. Le professeur de technologie nous chassait souvent car on jouait sur la porte métallique de son atelier, ce qui faisait un bruit monstrueux. Parfois, la balle roulait dans la bouche d'égout, et il fallait la rechercher en passant le bras assez profondément (au risque de se coincer l'épaule, ce qui est arrivé parfois). La technique payante dans ce jeu était de taper le plus fort possible, pour que la balle soit impossible à rattraper. Une autre technique consistait à donner une trajectoire en cloche à la balle, ce qui la faisait rebondir à la base du mur (c'est l'équivalent de l'amorti en tennis). Je passais parfois l'intégralité de la récréation à jouer à ce jeu, même sous la pluie. Si elle était mouillée, la balle se gorgeait de saletés qui restaient collées au mur à chaque impact. Quand nous n'avions plus de balles, car elle s'abimaient et étaient parfois confisquées, on jouait avec des chiffons recouverts d'élastiques. Ça ne rebondissait pas très bien... (écrit le: 2012-10-09) catégorie: scolarité - année: 1989
date: samedi 10/06/1989 (13 ans) lieu: Chambord
Nous partons avec l'école visiter les châteaux de la Loire. Un bâtiment destiné aux colonies de vacances a été réservé spécialement pour les élèves de quatrième de mon collège, soit environ une centaine d'adolescents. Depuis notre foyer près de Chambord, nous allons à bicyclette sur les routes pour en apprendre un peu plus sur cette région. Nous verrons Amboise, Cheverny, les usines de chocolat Poulain à Blois. Nous irons également voir une centrale nucléaire à St Laurent des eaux. Depuis l'explosion de la centrale de Tchernobyl, la psychose s'est emparée des gens autour du nucléaire. Le guide a beau nous rassurer, en nous expliquant les mesures de sécurité qui entourent cette activité, nous sommes totalement paniqués. La visite de cette usine nous a fait froid dans le dos. Le soir, il y a des fêtes organisées. On devait participer à des jeux, comme deviner un mot en le mimant, ou sauter d'une chaise avec les yeux bandés. Mais il y avait aussi des soirées dansantes. Ça flirtait beaucoup dans les chambres, bien qu'elles n'étaient pas mixtes. Pour ma part, je continuais à regarder Elise avec des yeux de merlan frit, alors qu'elle était en couple avec un camarade de classe. Une autre fille "s'intéresse" à moi, et me prête une montre, alors que c'est celle d'un autre garçon. Il est venu la récupérer un peu plus tard, sans comprendre pourquoi elle me l'avait prêtée. Pendant nos balades à pied ou à vélo, on s'ennuyait toujours un peu. On s'amusait à lancer des cailloux dans la Loire. L'un d'entre nous était fort en maths. Il disait qu'à force égale, on envoyait plus loin le caillou en le lançant à un angle de 45° que sous n'importe quel autre angle. Il avait cependant oublié que nous les lancions depuis un chemin situé à 10 mètres au dessus du fleuve. Du coup, il n'arrivait jamais à prouver son hypothèse ! L'ambiance était décontractée. J'essayais de m'amuser, mais je me sentais mal à l'aise dans cette promiscuité. (écrit le: 2013-02-17) catégorie: scolarité - année: 1989
date: mardi 28/11/1989 (13 ans) lieu: Paris
Nos professeurs de Français et d'Histoire avaient décidé de nous amener au Tribunal de Paris. L'exercice judiciaire était quelque chose de nouveau pour moi qui était au collège en classe de 3ème. Nous voyons des consommateurs de drogue défiler, refusant des avocats commis d'office, avec les conséquences dramatiques qu'on peut imaginer. Puis nous changeons de salle, et nous devenons les spectateurs d'un combat assez coquasse sur le thème des droits d'auteurs. Lio était assignée en justice par Mattel, la société qui vend les poupées Barbie. Sur une pochette d'album, elle ressemblait à la fameuse poupée. Certains de mes camarades de classe ont demandé un autographe à la chanteuse mais j'ai toujours senti une gêne en présence de gens connus, alors je ne l'ai pas fait. Nous avons appris plus tard que les juges n'avaient pas donné suite à la plainte de Mattel. (écrit le: 2011-07-14) catégorie: scolarité - année: 1989
date: jeudi 15/03/1990 (14 ans) lieu: St-Leu-la-forêt
Cours de mathématiques, en classe de 3ème. Notre professeur est calme, assez enveloppé, un visage très rouge et les cheveux couverts de Pento, avec un brushing "mini-vague". Lorsqu'il nous rendait les copies, il commençait par les meilleures notes. Autrement dit, quand on recevait son devoir corrigé en dernier, cela ne signifiait rien de bon... J'étais parfois avant-dernier, ante-pénultième, mais rarement dans les premiers. Ce jour là, le professeur nous remet nos devoirs de géométrie, et j'avais une note correcte. Ni le premier, ni le dernier: au milieu du troupeau. 14 sur 20, j'étais content pour une fois ! A la relecture de ma copie, il s'avère que le prof a fait une erreur d'addition. Il m'a mis trois points en trop. J'hésite, j'en parle à mon voisin de table qui me chuchote: « Ne lui dit paaaaas! ». Finalement, je lui rend ma copie en lui disant qu'il y a une erreur. Je n'ai jamais su s'il avait mis des points en trop pour m'encourager ou s'il avait réellement fait une erreur. Je me souviens lors de la réunion parent-professeur qu'il avait prévenu ma mère: "Attention: au lycée, le niveau est plus élevé. Pour lui ça va être dur, très dur...". (écrit le: 2012-02-11) catégorie: scolarité - année: 1990
date: vendredi 25/05/1990 (14 ans) lieu: Cork
La famille d'accueil nous a trouvé une chambre dans leur grande maison, que je partage avec Romuald, celui qui fait les photos du voyage avec moi. Ce couple assez âgé nous fait goûter les spécialités de la région. Ils ont un fils qui est un peu plus jeune que nous. La journée, nous allons visiter différents lieux aux alentours. Nous verrons Cork, Galway et de nombreux châteaux. La chanson des Christians, "Words", atteint des sommets au TOP50 et passe tout le temps à la radio. Cette chanson, inspirée de "Women of Ireland", composée par Seán Ó Riada colle tout à fait à l'endroit où je me trouve. Le père de la famille d'accueil souhaite savoir si nous voulons aller à l'église. Je dis "Pourquoi pas?", mais en fait il veut savoir si nous sommes croyants au point de devoir aller prier le dimanche. Le malentendu dissipé, nous n'irons finalement pas à l'église. Nos parcours se font la plupart du temps en bus. La couleur qui prédomine est le vert, ce n'est pas un hasard si le "shamrock", le trèfle, figure partout sur les drapeaux et les enseignes en Irlande. Les publicités pour la bière "Guiness", fleurissent également sur notre parcours. Le jour de notre départ, des profs ont retrouvé un tag dans les toilettes publiques (les seules du village). Catastrophe: les correspondants irlandais ont peur que cette mode s'exporte chez eux. Nous aurons droit à un sermon de la part des accompagnateurs. Le retour en ferry sera beaucoup plus tranquille que l'aller, sur une mer d'huile. On aurait dit qu'il s'agissait d'une croisière. (écrit le: 2011-09-02) catégorie: scolarité - année: 1990
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date: vendredi 01/06/1990 (14 ans) lieu: St Leu la Forêt
On mange bien à la cantine ? Pas vraiment, mais bon ça reste mangeable. Matthieu m'invite à déjeuner chez lui certains midis. Nous devons aller jusqu'à l'entrée de la cantine et tromper la vigilance des surveillants pour mettre notre carte de cantine dans une boîte. En effet, les élèves qui ne mangent pas à la cantine sont punis s'ils n'ont pas prévenus à l'avance de leur absence. Si une carte manque dans la boîte, cela signifie que l'élève n'est pas venu. Et comme on veut faire ça en douce, sans prévenir personne, il faut un peu tricher. Une fois le forfait réalisé, nous sortons de l'école par un trou dans le grillage. Arrivé dans la grande maison, chez Matthieu, il faut se préparer rapidement un repas. En général, il fait des oeufs brouillés, avec un peu de rhum pour donner du goût. Puis on a la maison pour nous tout seuls. C'est surtout les matchs de Roland-Garros à la télévision qui nous intéressent en fait ! Et si les cours ne reprennent pas avant 15 heures, on peut retourner au collège au dernier moment. Le problème c'est que la conseillère d'éducation va se rendre compte de mon absence une fois, un peu avant la fin de l'année scolaire. Je vais être obligé de faire une heure de colle ! Pas cher payé pour les nombreuses fois où on a mangé à l'extérieur sans rien dire à personne. (écrit le: 2012-09-18) catégorie: scolarité - année: 1990
date: lundi 11/06/1990 (14 ans) lieu: Margency
Pour la rentrée de septembre, ma mère m'inscrit dans un lycée privé à Margency. Elle avait constaté l'effet bénéfique des méthodes éducatives de cette école sur ma grande soeur. Elle espère qu'il en sera de même pour moi, même si elle ne m'a pas demandé mon avis. Cet établissement assure principalement l'enseignement secondaire pour les enfants des villes avoisinantes. Le catéchisme y est assuré par des pères maristes. Ils s'occupent de l'éducation religieuse facultative. C'est la première fois que je ne serai pas scolarisé dans une institution publique. Le proviseur souhaite me rencontrer, ma mère va donc m'accompagner là-bas. Cet établissement privé sous contrat s'appelle "Notre-Dame de Bury". J'aurais du me méfier, ou disons me préparer. En anglais "to bury" signifie "enterrer", c'est la sensation que me fait cet endroit en y entrant. Le domaine, qui appartient aux pères, est assez grand. Il y a un château du XIXème et un grand parc à entretenir. Dans des constructions d'un ou deux étages se trouvent les classes. Nous arrivons dans le bâtiment moderne mais déjà bien fatigué où se trouvent les lycéens. Le proviseur a un bureau au rez-de-chaussée, il nous invite à entrer. Il me pose des questions, sur ce que je souhaite faire dans la vie. On dirait un entretien d'embauche, sauf que je ne m'étais pas du tout préparé à ça. "Qu'est-ce que tu regardes à la TV?". Je me voyais mal lui répondre que je passais mon temps devant le "Club Dorothée". Épuisant dans ma tête la liste des programmes tous plus inavouables les uns que les autres, j'ai fini par répondre "La Météo" en bafouillant. Ça l'a bien fait rire. Je me souviens aussi de ses airs supérieurs. J'avais les larmes aux yeux, de celles qui montent quand on se sent impuissant. Il devait avoir l'impression de nous rendre à ma mère et à moi un immense service en m'acceptant dans "son" école. J'avais surtout le sentiment de lui inspirer de la pitié, au regard de mes bulletins de note et des revenus pourtant honorables de ma mère. Il faut dire que l'admission se fait sur la base de critères scolaires et financiers, le tarif évoluant en fonction du quotient familial. Je mettais les pieds dans un univers totalement étranger à mon mode de pensée. Beaucoup d'élèves de Bury étaient plus doués que moi, ce qui n'était pas difficile, et les revenus de leurs parents dépassaient largement la moyenne nationale. Encore peu enclin à soutenir une confrontation, je faisais aussi l'entrée dans un monde compétitif qui ne me plaisait pas. J'étais prêt à me faire gober comme un huître. Je n'ai compris cela qu'après les vacances scolaires... (écrit le: 2014-11-23) catégorie: scolarité - année: 1990
date: lundi 18/06/1990 (14 ans) lieu: Saint-Leu-la-forêt
Je passe le brevet. Je planche sur l'examen dans une relative décontraction. Ce sont des questions très faciles. On nous demande par exemple ce que signifie 'TGV' ? Quoi qu'il arrive, échouer à cette épreuve n'empêchait pas de passer du collège au lycée. Après l'annonce des résultats, je n'ai pas osé allé voir sur les panneaux affichés à l'extérieur du collège pour savoir si je l'avais eu ou pas. J'ai menti en disant à ma mère que j'avais été voir et que j'étais admis. J'avais un peu honte de ce mensonge, surtout que je n'étais pas sûr d'avoir eu une bonne note. Mathieu ne comprends pas pourquoi je me retrouve dans cette situation, il insiste pour que nous allions vérifier. Je suis retourné au collège quelques jours plus tard avec lui pour voir si les résultats étaient toujours disponibles. Malheureusement, les affiches avaient été détachées. Il faut dire que l'année scolaire était terminée. Le gardien du lycée a bien voulu nous ouvrir la porte et nous a expliqué que les résultats étaient rangés dans un coin. J'ai vu mon nom avec la mention 'Admis'. J'ai remercié le gardien et je suis parti. (écrit le: 2017-03-31) catégorie: scolarité - année: 1990
date: vendredi 01/11/1991 (15 ans) lieu: Paris
A peine commencée, mon année scolaire s'annonce difficile, surtout en maths. Impossible de comprendre certains concepts, ou alors quand je finis par les comprendre, l'exercice est terminé, et la méthode de résolution ne nous servait plus jamais. Ma mère a insisté pour que je fasse des mathématiques pendant cette semaine de congés. Du coup, j'ai des cours de soutien scolaire pendant mes vacances de la Toussaint. Les cours ont lieu près de la station Boulainvilliers dans le très chic XVIème arrondissement de Paris. Pour arriver à l'heure, je dois prendre plusieurs correspondances dans les transports en commun. Je ne sais pas trop ce que je fais là. Les élèves sont accueillis dans l'appartement d'un immeuble haussmannien, converti en école privée. On nous offre un carambar au début de chaque cours, ce qui nous fait comprendre que l'ambiance sera décontractée. Les autres élèves sont dans les mêmes difficultés que moi. Le niveau était quand même beaucoup moins élevé que dans les cours que j'avais au lycée. L'un dans l'autre, je finis donc la semaine en ayant eu très peu de mal à faire les exercices. Je soupçonnais les professeurs de brider la difficulté pour nous redonner confiance en nous. Quant aux mathématiques, ça ne servait à rien de s'acharner. L'année prochaine, je ne ferai pas de 1ère scientifique. (écrit le: 2013-06-08) catégorie: scolarité - année: 1991
date: jeudi 20/02/1992 (16 ans) lieu: Margency
A la suite de son prix Nobel de Chimie, Pierre Gilles de Gennes avait décidé de rencontrer les étudiants, lycéens et collégiens de France, à travers une série de conférences. 200 conférences, un vrai marathon! Ce jour là, il était à Notre-Dame de Bury, et nous étions rassemblé pour écouter la parole du sage. Le spécialiste des matières molles, les « objets fragiles » qu'il évoquera dans un livre paru en 1994, nous parle simplement de choses compliquées. Il souhaite aussi savoir ce que nous pensons, nous invite à poser des questions. Très peu d'entre nous ont eu le courage de parler face à ce génie des sciences. Il a un drôle de look: un mélange entre le professeur Tournesol et Fernandel. Les questions que nous avons posé portaient principalement sur ce qui l'avait amené sur la voie de la recherche scientifique. Très peu de gens connaissaient les motivations qui l'on conduit sur ce chemin, ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que ce prix Nobel l'a incité à partager son savoir avec le plus grand nombre. C'est un grand honneur de l'avoir vu en personne. (écrit le: 2012-04-10) catégorie: scolarité - année: 1992
date: jeudi 16/04/1992 (16 ans) lieu: Margency
Notre presseur d'économie insiste cette année encore pour que nous apportions des photos de publicités découpées dans des magazines. Cet homme est souvent mal coiffé, mal rasé, mais il porte un costume et une cravate. Il n'est pas vraiment du genre à se laisser faire. Il n'est pas non plus du genre à survoler son sujet. Ce ne sont pas des jeunes « imbéciles » comme nous qui allons le faire marcher. J'aime bien son cours, même si oralement, je ne participe pas beaucoup. J'échappe miraculeusement à sa verve sarcastique, bien que mes notes dépassent rarement la moyenne avec lui. Nous voici donc dans son cours d'analyse des images. Un homme averti en vaux deux, et je redouble ma seconde. L'année dernière, ce cours a eu lieu à peu près au même moment de l'année, j'ai donc pris mes précautions. Certains élèves moins au courant que moi ont apporté des images de publicités pour des biscuits, des voitures,... Mais la seule chose qui intéresse Mr Cuénot, ce sont des publicités, clairement sexistes, qui représentent des femmes dans des poses plus que suggestives. J'ai donc ramené une dizaine de pages découpées dans « Télérama », ou le magazine de cinéma « Première » auquel je suis abonné. Ce sont des publicités pour du parfum par exemple. Il n'en faudra pas plus pour faire démarrer la machine à analyser les images de notre cher professeur. « Regardez comme cette femme est penchée en avant, elle s'offre littéralement au regard lubrique des futurs clients ». Il met en lumière une autre tendance des publicitaires à ne faire apparaître que le corps des femmes. Les têtes disparaissent souvent comme par hasard du cliché! Nous sommes complètement fascinés par la description minutieuse qu'il fait de ces publicités. Pour une fois que le cours devient intéressant. Au delà du côté « voyeur » de cette leçon d'économie un peu spéciale, j'ai découvert grâce à lui un domaine passionnant que j'ignorais jusque là. Quand nous regardons la télévision, nous sommes assaillis par des tonnes d'images. Elles sont devenues tellement difficiles à « lire » qu'il faut beaucoup d'expérience pour les décoder. Dans l'émission « Culture Pub », on pouvait déjà assister à une analyse intéressante des tendances en matière de films publicitaires. J'ai été par la suite accro à l'émission de Daniel Schneidermann, « Arrêt sur images ». Derrière chacune de ces images se cachent des intentions, des manipulations,... et des clichés (sans jeu de mot !). Commencer à les analyser permet de se libérer de l'influence qu'elles peuvent avoir sur notre vie, sur notre opinion et nos choix. Sans ce cours, je ne me serai probablement pas autant intéressé à ce sujet. (écrit le: 2013-04-24) catégorie: scolarité - année: 1992
date: vendredi 11/06/1993 (17 ans) lieu: Margency
Au cours d'une partie de basket-ball, je me suis fêlé le petit doigt de la main droite. Il a fallu faire de nombreuses radios, et le médecin de l'hôpital m'a fait porter un attelle pendant un mois. Pile au moment du bac français
Ce n'est pas encore trop grave pour l'épreuve orale. Ça l'est un peu plus pour l'écrit. La plaque métallique qui protège mon doigt frotte sur la feuille quand je rédige mon résumé, du coup, ma copie est couverte de volutes grises qui suivent ma calligraphie hésitante. Pour l'oral, notre professeur nous fait présenter une liste de textes qui sont sur le thème du "culte de soi". Rousseau, Sartre et Voltaire sont dans cette liste, qui me sort par les yeux tellement je suis en désaccord avec le parti pris par notre prof. Si j'avais eu l'intelligence et le courage de faire ma propre liste, j'aurais certainement choisi d'autres textes. Plutôt que "cultiver son for intérieur", il me semblait plus important de "cultiver son rapport aux autres". Probablement qu'un extrait des "Raisins de la colère" de Steinbeck aurait été dans cette liste. L'un dans l'autre, j'ai passé l'épreuve, avec la moyenne puisque j'ai eu 11 à l'écrit et 9 à l'oral. (écrit le: 2013-12-15) catégorie: scolarité - année: 1993
date: vendredi 10/09/1993 (17 ans) lieu: Strasbourg
Mon dossier scolaire était plombé. Impossible d'entrer dans le lycée qui était en face de chez moi. Me voilà inscrit dans une boîte à bac, le lycée des Essarts, à un peu plus d'un kilomètre de chez moi. Létablissement est tenu par une quinquagénaire au fort accent des pays de lest. Ma classe était composée de quinze élèves tous plus insouciants les uns que les autres. Comme dans une prison, on faisait connaissance avec les camarades de classe en se posant une question "Pourquoi t'es là ?". Certains avaient été exclus du lycée public. D'autres étaient inscrits car leurs parents pensaient qu'ils seraient mieux encadrés dans une petite structure. En fait, c'était tout le contraire. J'étais libre comme l'air, la quantité de travail à fournir était à peine la moitié de ce que je devais faire à Notre-Dame de Bury. Pour le cours dHistoire-Géographie, jarrivais à la fin de la première heure, et personne ne trouvait à y redire. Je savais que j'aurai à le payer à la fin de l'année, mais en attendant je profitais de ma liberté pour faire connaissance avec Strasbourg et son quartier étudiant. Le plus étonnant était peut-être le prof de philo, un jeune type hirsute mais très rigoureux, et qui nous a fait faire le programme à sa manière. Nous avions du mal à comprendre ce qu'il disait à cause de sa barbe, et il désespérait de lire quelque chose d'intelligent sur nos copies. Il a remarqué avec une surprise émue un passage d'une de mes dissertations où j'expliquais que "l'instant est au temps ce que le point est à la géométrie, il n'a ni longueur, ni largeur". La plupart du temps, il était déçu par ce que j'écrivais. (écrit le: 2011-07-26) catégorie: scolarité - année: 1993
date: mercredi 20/10/1993 (17 ans) lieu: Strasbourg
Une personne de ma classe de Terminale B s'appelle Florent. Je n'avais pas l'habitude de rencontrer des gens qui portaient mon prénom jusqu'à présent, et surtout pas des gens de mon âge. Il y avait bien une personne connue: Florent Pagny, mais je ne connaissais personne d'autre. Florent est alsacien, contrairement à moi, qui incarnait le parisien auprès de mes camarades de classe. Il est surtout très sportif, et fait du VTT en compétition. Son asthme le fait souffrir de temps en temps, il doit prendre de la Ventoline pour calmer ses crises passagères. C'est la raison pour laquelle il ne sépare pas de son inhalateur. Il ne pense absolument pas aux études, et n'est pas ce qu'on peut appeler un bon élève. Je vais probablement être contaminé par son insouciance, dans cette école où il n'est pas vraiment nécessaire de faire des efforts. Nous profitons des pauses déjeuner pour nous balader avec Haingo en centre-ville. Il marche tellement vite que nous avons du mal à le suivre. Il crache par terre et n'a pas l'air de trouver ça dégoutant. Passionné par l'histoire de sa ville, il est intarissable sur l'origine du nom des places, des avenues ou des bâtiments remarquables de la capitale alsacienne. Nous mangeons dans un des restaurants universitaires de la ville. Il y a le choix: un self à côté de la Place St Etienne ou des pizzas dans le "Gallia". Nous rencontrons souvent là-bas des amis à lui qui sont déjà à la Fac. Certains étudient des langues étrangères, comme le sanskrit. Je dois avouer que j'ai besoin d'aide pour m'adapter aux changements. Je suis à Strasbourg depuis deux mois à peine. D'une certaine manière, mon homonyme est comme un guide touristique, qui organise tout. C'est bien pratique, car je ne sais absolument rien faire tout seul dans cette grande ville. C'est la première fois que je vis dans un centre urbain comme celui-là. Même si je vivais en banlieue parisienne, l'ambiance y était tout à fait différente et nécessitait des moyens de transports qui ne facilitaient pas les sorties. Ici, j'étais libre. (écrit le: 2013-02-17) catégorie: scolarité - année: 1993
date: lundi 23/05/1994 (18 ans) lieu: Strasbourg
Je n'ai pas beaucoup d'argent pour les loisirs, et notamment pour les magazines de cinéma ou de jeux vidéo. Heureusement, Nourredine est là pour nous fournir des journaux à bon prix. Ce camarade de classe a quelque chose d'Arsène Lupin. Il a des ardoises partout, deale un peu de shit. Avec ses tenues plutôt classiques et ses petites lunettes, on ne peut pas imaginer qu'il fait du trafic. Il sortait avec la jeune fille BCBG de l'école. Accessoirement, il passe dans des librairies pour les délester de quelques articles discrètement. Sa technique, bien rodée, consiste à laisser ouverte la pochette de sa sacoche, et à glisser dedans tout ce qui passe à sa portée, du moment que ce n'est pas trop épais. En classe, il participait à tous les cours, surtout s'il s'agissait de plaisanter. Il est poli avec tout le monde, et tient la porte aux vieilles dames. En somme, c'est le gendre idéal. On peut dire que je l'enviais un peu, même si je trouvais qu'il gâchais son temps, et son intelligence. On allait parfois jouer ensemble aux jeux d'arcade dans le bar 'la ville de Paris' où il avait ses habitudes. On jouait aussi à la console de jeu quand il passait chez moi. Un soir, son père m'a appelé, je ne sais pas comment il a eu mon numéro. C'était un peu avant la fin de l'année scolaire. Cet homme, né en Algérie, voulait me demander si son fils était sérieux, et s'il allait avoir son bac. Je n'ai pas eu le courage de lui répondre la vérité. Ceci dit, ce n'était pas vraiment à moi de le faire. Je l'ai revu une ou deux fois après le lycée, il essayait de suivre des cours pour entrer dans une école d'informatique, il était séparé de sa copine à l'époque. Il vivait chez son grand-frère, qui avait une plantation d'herbe installée sous les toits d'un immeuble. Les lampes marchaient 24/24 pour éclairer les plants de cannabis. Les clients venaient se fournir à leur appart. Autant dire qu'il y avait de la circulation dans cet espace confiné. Ça générait un revenu suffisant pour leurs dépenses courantes. Je ne sais pas combien de temps il est resté dans cette situation, mais j'ai pensé qu'il méritait mieux que de suivre l'exemple de son frère. (écrit le: 2013-03-20) catégorie: scolarité - année: 1994
date: vendredi 10/06/1994 (18 ans) lieu: Strasbourg
Il faisait très beau, et j'attendais ce moment avec impatience. On va enfin passer notre baccalauréat. L'épreuve commence avec le devoir de philosophie. Notre boîte à bac n'a pas le droit d'organiser l'examen, nous sommes donc convoqués au Lycée Jean Monnet à 8h00. Les sujets étaient: « Peut-on attendre tout de lÉtat ? », «
Le temps est-il pour l'homme une limite ? » et un texte d'Aristote. L'examinateur attend le début, puis nous annonce: "Vous avez 4 heures". Notre professeur de philo nous avait fait étudier longuement un texte de Bergson, extrait de son livre « Essai sur les données immédiates de la conscience ». Il y était question de temps, d'espace et de la perception que les hommes ont de ces deux notions. Mais je n'ai pas osé m'attaquer à ce sujet. Comme je ne fais pas confiance à mes capacités d'analyse (pour d'excellentes raisons !), j'ai laissé comme d'habitude le texte philosophique de côté. Je me suis donc mis à écrire sur le lÉtat, et ce qu'on pouvait en attendre. On peut citer des auteurs dans son devoir, mais pas trop (j'ai du citer Montesquieu). La structure classique (thèse-antithèse-synthèse) de mon texte de six pages n'a pas du être suffisante pour m'assurer un bonne note. 7/20, ça ne m'a pas trop surpris. La philo, c'est un peu la loterie: ça passe ou ça casse. Enfin, ça casse souvent quand on ne sait pas de quoi on parle. Heureusement que les mathématiques et le sport m'ont rapporté des points. Pour la dernière épreuve, l'oral d'anglais, je me retrouve dans le Lycée de Bischheim. Heureusement que Marjorie, une élève de notre classe, a une petite voiture pour nous amener à destination. C'était le 29 juin. Malgré mon aisance à parler anglais, j'ai un peu séché sur le vocabulaire. Incapable de me souvenir du mot « télécommande » en anglais ("remote control" !), j'ai du perdre quelques points. Il y avait aussi un texte sur les concerts de Woodstock en 1968 à analyser. Quelques jours après, j'avais mon bac avec une moyenne de 10,04. Mention « passable ». J'étais le seul de ma classe à l'avoir... (écrit le: 2013-09-21) catégorie: scolarité - année: 1994
date: lundi 23/09/1996 (20 ans) lieu: Strasbourg
Cette fois, il faut choisir une école. L'ESIG est l'école supérieure d'informatique et de gestion, un petit établissement qui prépare les élèves aux différents cursus en BAC+2. On me reçoit dans les locaux du centre-ville de Strasbourg: je décris mon parcours à l'université, et demande comment se déroule la scolarité. Il va falloir sortir une grosse somme d'argent pour les frais de scolarité, et trouver un stage ou un contrat de qualification dans une entreprise. Je me suis fait à l'idée que la comptabilité était la seule chose que j'allais réussir à apprendre. Il faut aussi se ré-habituer à une salle de classe, et à des camarades pas toujours très sympathiques. Heureusement, les professeurs sont très rigoureux, ce qui n'est pas le cas des dirigeants de la boîte qui semblent constamment en train de plaisanter. C'est parti, coûte que coûte, il me faut un BTS. (écrit le: 2011-09-02) catégorie: scolarité - année: 1996
date: mardi 15/10/1996 (20 ans) lieu: Strasbourg
Première année de BTS. Les cours de français sont obligatoires. Cela fait trois ans que je n'ai plus fait de rédaction. Je m'amuse. Pour expliquer le terme "Tour d'ivoire", je fais un jeu de mot: "on est tenté d'y voir une référence au caractère luxueux de cette matière". La prof a souligné la phrase en rouge et précise: "style pompeux". (écrit le: 2011-07-01) catégorie: scolarité - année: 1996
date: lundi 10/03/1997 (21 ans) lieu: Strasbourg
Je me déplace quasiment exclusivement en vélo dans Strasbourg. C'est le moyen le plus rapide pour atteindre une destination en centre-ville. Aucun ticket de stationnement, aucun garage à payer pour entretenir mon véhicule, aucun carburant à verser dans le réservoir. La liberté. La plupart des étudiants sont arrivés à la même conclusion que moi. Les supports installés par la ville pour accrocher ses bicyclettes sont donc remplis plus que de raison. Il n'y a souvent aucune place, il faut donc trouver une rambarde ou un poteau signalétique pour poser le vélo et fixer l'antivol. Ce jour là, j'avais un cours à l'ESIG, rue du 22 Novembre. C'est à côté d'un autre vélo que j'ai mis le mien, et le câble qui bloque mon cadre sur le tube métallique est un peu serré. Quelques heures passent, et ma prof de français déboule dans la salle de classe. Elle est visiblement paniquée. Cette jeune femme donne des cours pour financer ses études. De taille moyenne, assez jolie, j'aime la regarder quand elle ne fait pas attention. Mais elle est tellement farouche et stressée qu'il ne vaut mieux pas s'y frotter. Elle est furieuse. Son vélo est coincé. "Qui a un vélo orange ?". Je me sens visé, c'est de moi qu'il s'agit. J'ai trop forcé lorsque j'ai posé mon VTC. Une pédale est enfoncée dans ses rayons. Je descends de l'immeuble pour l'aider à décoincer son destrier. Elle fait la tête. Pas "merci", pas "au revoir". Elle s'en va et j'en profite pour admirer sa chevelure alors qu'elle fonce vers la fac de lettres. (écrit le: 2016-09-11) catégorie: scolarité - année: 1997
date: lundi 12/01/1998 (22 ans) lieu: Strasbourg
L'école n'a plus de fond propres et doit assurer notre enseignement malgré l'absence d'argent. Déjà que je n'avais pas de cours d'informatique, il va être difficile d'assurer le minimum pour réussir les épreuves. En plus, le déménagement va encore m'éloigner de l'école qui s'installe à Schiltigheim, au nord de Strasbourg, donc à l'opposé de mon logement. Je suis obligé de prendre le tram, puis de faire un changement pour prendre un bus en centre-ville. Je vais d'ailleurs essayer de gagner du temps en y allant parfois à vélo, ce qui est épuisant. C'est un bâtiment qui appartenait à une entreprise dans lequel l'école a du se déplacer pour faire des économies. Rien n'est adapté pour les cours. Il y a des bureaux assez grands pour faire des réunions, mais pas de tableaux: on doit se débrouiller avec les paper-board. Je suis seul à passer le BTS comptabilité-gestion, car les autres se sont découragés ou ont changé d'école. Le stress va monter progressivement jusqu'au mois de mai. (écrit le: 2011-09-02) catégorie: scolarité - année: 1998
les propos tenus n'engagent que son auteur, les souvenirs relatés dans ces anecdotes sont subjectifs | Contactez-moi