date: dimanche 15/01/1995 (19 ans) lieu: Strasbourg
Ca y est, je me suis décidé. Ma passion pour le Japon, les mangas et les jeux vidéos m'amène tout naturellement à m'intéresser à la langue de ce pays. J'ai envie de dépasser cette barrière et de comprendre enfin ce que je tente de deviner maladroitement. Je me penche vers la méthode "Assimil", un ouvrage assez simple à prendre en main et qui donne les rudiments de la langue nippone. Arrivé à la caisse de la Fnac, l'employée qui me voit arriver avec le petit livre à couverture blanche et brillante me met en garde. Elle pense qu'il me sera impossible d'apprendre quoi que ce soit avec pour seul atout les leçons illustrées de ce bouquin. Cette mise en garde a sonné en moi comme un défi. Dès que je suis rentré chez moi, je me suis mis sérieusement à étudier la langue du pays du Soleil levant avec une assiduité qui me manquait sans doute dans mes études de micro-économie à la fac. J'avais d'ailleurs déjà abandonné l'idée que je réussirais quoi que ce soit dans cette voie du DEUG de Sciences Eco, vu mon niveau en mathématiques. Le japonais "sans peine", comme le précise la couverture du livre, n'est pas tout à fait honnête dans sa promesse. Et de la peine, j'en ai eu à apprendre les hiéroglyphes qui me sautent aux yeux dès les premières pages. Ce sont d'abord les idéogrammes qui me semblent compliqués, tous petits et dessinés avec des pattes de mouches. J'arrive déjà un peu mieux à déchiffrer les hiraganas et les katakanas. Il s'agit de l'écriture japonaise dans laquelle les mots sont décomposés en syllabes. Les hiraganas sont en fait une forme simplifiée des "kanjis", les idéogrammes chinois qui sont utilisés au Japon. Les katakanas ont la même caractéristique mais sont encore plus simplifiés, avec leur forme rectiligne et plus proche des lettres alphabétiques "romaines" que nous connaissons. C'est pourquoi on les utilise principalement à exprimer un mot étranger dans la langue japonaise. Pour écrire des mots anglais surtout, mais également des mots français. Je suis avec attention les aventures d'un groupe d'amis qui s'amusent à décliner les subtilités grammaticales du japonais. Des mots à la consonance exotique se mettent à occuper mon esprit, sans que je sache vraiment si tout cela me sera utile un jour. (écrit le: 2021-09-17) catégorie: études - année: 1995
date: jeudi 01/06/1995 (19 ans) lieu: Strasbourg
J'écris un fanzine. C'est un magazine écrit par un fan sur un sujet qu'il affectionne. Par contre, le sujet n'est pas bien défini: j'écris un peu sur tout ce qui me plaît. Comme je suis incapable de faire un travail d'équipe, je fais tout. Écriture, mise en page, impression, photocopies,... Le principe est le suivant: le tirage est exponentiel (quelle idée ré-vo-lu-tion-naire !). Le numéro 0 est tiré à un exemplaire...logique non ? les numéros suivants seront tirés à 2.72, puis 7.39, 20.09 exemplaires. J'ai arrondi à l'entier supérieur pour faciliter la tâche! En ce mois de juin 1995, j'arrive au 4ème numéro, qui sera donc imprimé (photocopié) en 55 exemplaires noir & blanc. L'ordinateur de mon père, un Mac avec un logiciel relativement rudimentaire de mise en page (RagTime), me sert à réaliser chaque numéro. J'imprime sur une machine StyleWriter d'Apple. Je distribue ce magazine autour de moi, la famille, les amis. C'est gratuit. Il y a des articles sur les sujets qui me passionnent: la musique, la BD, le Japon, le cinéma. Le journalisme, ce n'est pas pour moi. Je sais déjà que ça ne sera pas mon métier. Les raisons qui me poussent à écrire sont plus simples. Le fait est que mes études se passent mal, c'est un échec complet, et je cherche à m'en échapper grâce à une activité sans enjeux particulier, qui m'amuse et fait appel à des techniques que j'ai envie d'apprendre. Qu'est-ce que les gens en pensent ? Ça peut sembler bizarre, mais je m'en fous un peu, je fais ça pour moi. C'est plein de fautes d'orthographe. Ce 4ème opus sera le dernier numéro de ce fanzine. L'année suivante, j'aurais un peu plus de passion pour mes études, et donc un peu moins de temps libre pour ce loisir jouissif qu'était ce "laboratoire" d'écriture complètement libre. (écrit le: 2011-12-12) catégorie: loisirs - année: 1995
date: vendredi 16/06/1995 (19 ans) lieu: Strasbourg
J'avais réussi de justesse le code. Il me restait à convaincre l'examinateur pour la conduite. Nous avions rendez-vous le matin, à Hautepierre dans un quartier un peu excentré de Strasbourg. Nous sommes nombreux à attendre notre tour pour passer avec les examinateurs. Il m'a fallu plusieurs cours supplémentaires de conduite dans les semaines précédentes pour réviser les nombreux pièges à éviter pour ce jour important. Angles morts, retrogradages, priorités à droite et démarrages en côte n'ont plus de secret pour moi. Seul problème, je n'ai pas réussi à faire le créneau pour garer la voiture pendant ces cours supplémentaires. Nous partons dans la Clio blanche à double commande avec les deux examinateurs et une jeune fille. Je suis le deuxième à passer. La jeune fille qui se fait examiner n'est pas très sure d'elle. Elle cale souvent, oublie de regarder dans le rétroviseur de temps en temps, et bien sûr n'arrive pas à faire son créneau. C'est mon tour, je suis prêt. Je passe sans problèmes les vitesses, je roule dans les limites autorisées, et je sens que tout va bien. Au moment de faire le fameux créneau, mes mains deviennent moites. Je passe la marche arrière, et je recule doucement. Un des examinateurs m'arrête. -"Vous ne regardez pas dans le rétroviseur?" -"Si, si". Ouf, ça passe. Je suis garé, je débraye et j'arrête le moteur. Sur le chemin du retour, un véhicule me laisse la priorité car il y avait une chicane, je fais un signe de la main au conducteur. Là je sais que j'ai mon permis. Yeeessss! On me donne le fameux papier rose, et je souffle comme si j'avais évité une météorite. Je rentre chez moi fier comme un paon, sauf que je suis à pied, évidemment. (écrit le: 2011-07-25) catégorie: voiture - année: 1995
date: lundi 10/07/1995 (19 ans) lieu: Roquefort-sur-Soulzon
Nous étions dans la région des grands Causses. C'était pendant un détour par le Massif Central alors que nous nous dirigions vers les Pyrénées. Partis faire une visite guidée dans le lieu de production d'un des fromages français les plus "prestigieux", j'ai eu le plus long fou rire de ma vie. La raison m'en échappe encore. Les deux marques "Papillon" et "Société" fabriquent leur produits dans le sous-sol calcaire de cette région. Il faisait chaud, et entrer dans ces souterrains à l'ambiance plus fraîche était une véritable bénédiction. Nos étions dans les caves du Roquefort Société. Quand le guide a commencé à nous décrire l'activité du site, je me suis montré intéressé. A partir du moment où une présentation vidéo (dithyrambique) a été lancée, je n'arrivais plus à m'arrêter de rire. Le petit film qu'il nous a montré laissait penser que la découverte du Roquefort avait sauvé l'humanité. Dans cette vidéo, les termes 'magie', 'miracle' et 'légendes' passaient en boucle. Le contraste entre la réalité et la fiction m'ont fait sourire. Puis, n'y tenant plus, j'ai franchement rigolé. Le problème est que les voûtes de ces caves ont tendance à amplifier les bruits. Je me bouchais le nez pour essayer de ne pas trop gêner le guide qui nous menait d'une salle à l'autre. J'étais rouge pivoine, et à ce moment là, mon fou rire m'empêchait presque de respirer. Je me tenais à l'écart du groupe pour éviter de me faire trop remarquer, mais l'écho de mes éclats de rire ne pouvait pas passer inaperçu. Il m'a fallu quelques dizaines de minutes à l'extérieur des caves pour retrouver mon état normal. Le manque d'oxygène était-il à l'origine de mon état ? A chaque fois que quelqu'un me parle du Roquefort, je pense à cette histoire, et je ne peux m'empêcher de sourire... (écrit le: 2013-06-08) catégorie: voyages - année: 1995
date: lundi 17/07/1995 (19 ans) lieu: Luchon
Stage de parapente pendant une semaine à Luchon. Nous sommes ma mère, Gérard et Loris, partis en Renault Espace direction les Pyrénées. Je fais le stage avec les débutants, et Loris et Gérard font le stage "avancé", car ils ont déjà pratiqué avant. Loris et moi dormons sous des tentes igloo, ma mère et Gérard délaissent assez vite leur tente pour aller à lhôtel tout proche. Les cours ont lieu sur des pentes douces des alentours. Nous revoyons nos exploits en vidéo le soir, pour comprendre nos erreurs. Il y a également des cours théoriques de météorologie pour comprendre les masses d'air, et les dangers de ce sport de vol libre. Après quelques sauts de puce, de quelques dizaines de mètres, nous sommes prêts à nous élancer sur les pentes de la montagne. Les sauts sont très encadrés, nous prenons de lélan face au vent, puis nous sommes guidés par radio dans le casque pour tourner à gauche ou à droite. Latterrissage se fait sur le bord dun lac dans la vallée. Nous avons fait quatre ou cinq sauts. Comme nous avons des VTT, nous faisons également des balades aux alentours. Malheureusement, je crève un pneu, et je dois rentrer à pied au milieu dun parcours. Après le stage, nous sommes invités à participer à du canyoning dans l'Espagne toute proche. Cette activité nétait pas prévue, et les sensations fortes sont au rendez-vous. Le moniteur me demande si mon sac à dos est résistant, car le parcours est assez exigeant. Avec une combinaison en néoprène, nous nageons dans un cours deau vive, mais glacé. Quand il y a une cascade, nous devons sauter parfois de plusieurs mètres dans les vasques. Mon sac à dos craque sous la pression, et le moniteur doit prendre les affaires qui étaient dedans, jétais pourtant sur quil tiendrait. Nous finissons par rentrer à Paris, je dois me préparer à un stage de protection du patrimoine qui commence bientôt. (écrit le: 2011-07-27) catégorie: voyages - année: 1995
date: samedi 14/10/1995 (19 ans) lieu: Paris
Situé à Bercy Expo, aujourd'hui appelé « Immeuble lumière », ce festival se tient une fois par an. Mais un clivage s'est créé entre l'espace animation/culture japonaise, et la bande dessinée traditionnelle. Personne du côté bande dessinée franco-belge...les dessinateurs pleuraient devant les rares visiteurs pour leur proposer une dédicace. Les éditions suivantes vont devenir plus compliquées pour les organisateurs, qui n'arriveront plus à réunir ces deux genres à l'intérieur de cet événement consacré au « 9ème art ». Puis la Japan Expo va être créée en 1999 et deviendra lévénement phare du domaine du manga en région parisienne. Pour l'instant, je fais des aller-retours entre deux espaces qui s'ignorent. J'étais abonné à un fanzine "Coyote", je vois l'éditrice de ce magazine très spécialisé, qui se faisait appeler « Kaori », mais je n'ose pas m'approcher. Je vois Greg, un rédacteur très connu dans le domaine de la presse jeux vidéo japonais, entouré d'une horde de suiveurs. Dans la partie plus traditionnelle, j'achète un exemplaire de la BD d'Enki Bilal « La foire aux immortels », 65F ? non c'est une erreur, c'est 650F. Je prend quand même, mais c'est limite au niveau de mon compte en banque. Ça doit être ça être fan. (écrit le: 2011-08-17) catégorie: festival - année: 1995
date: samedi 28/10/1995 (19 ans) lieu: Strasbourg
Le film « Trust Me » de Hal Hartley est diffusé dans un amphi de la fac un samedi soir. C'est l'association des élèves qui a organisé cette projection, à petit prix pour les étudiants fauchés comme nous. J'invite Elka à voir le film avec moi. Cette élève d'origine bulgare est un peu perdue à Strasbourg. Son accent et ses cheveux bruns et bouclés me plaisaient. Elle était dans le même cours de sciences économiques que moi l'année dernière. J'imagine que j'ai une chance de la séduire, mais je découvre qu'elle a un petit ami. Il s'agit donc de profiter de la soirée, sans arrières pensées. Quoi qu'il arrive, j'ai déjà vu cette comédie dramatique sortie en 1991, quelques années plus tôt. Il s'agit d'une rencontre entre deux personnages paumés. L'action se passe dans un New Jersey industriel, une banlieue typique du Nord-Est des États-Unis. Lui ne supporte pas les carcans et vit chez son père alors qu'il a déjà plus de 30 ans. Il est incapable de garder un boulot car il a du mal à supporter les compromis. Il lit beaucoup et a du mal à s'opposer à l'autorité que lui impose son père. Elle, beaucoup plus jeune, vient de découvrir qu'elle est enceinte et n'arrive pas à se persuader d'avorter. Elle se sent coupable d'avoir provoqué l'infarctus de son père et fugue dans l'espoir de trouver la force de se pardonner à elle-même. Sa mère l'oblige finalement à se comporter en adulte, mais elle manipule son entourage pour y parvenir. Dans ce rôle de jeune fille à la moue boudeuse, Adrienne Shelley est parfaite. Elle change physiquement entre le début et la fin du film, signe que le passage à l'âge adulte est en cours. C'était un choc d'apprendre que cette actrice est décédée en 2006, après avoir presque disparue des écrans. J'avais aimé cette ambiance un peu irréelle, le jeu des acteurs assez théâtral, et la relation des deux personnages est délicatement saisie par Hartley. Certaines scènes, un peu burlesques, semblent sorties d'un rêve. D'une certaine façon, cela représentait bien la frange indépendante du cinéma américain. L'économie de moyens n'enlevait rien à l'émotion transmise par les images. Hal Hartley a continué à sortir quelques films dans la même veine (Simple Men, Amateur,...). Dommage que les films suivants de ce réalisateur n'aient pas trouvé leur public. (écrit le: 2015-11-28) catégorie: cinéma - année: 1995
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