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06/07/2022 à 17h46
Mes objets sans regrets

Ce sujet me trotte dans la tête assez souvent. Combien de fois ai-je été déçu par un objet mal conçu ? Et pourtant, je ne crois pas à l’obsolescence programmée, bien au contraire. Je crois surtout aux mauvais choix des consommateurs. Car en effet, on peut imaginer la logique qui a dicté la commercialisation de ces machins destinés à finir à la poubelle. Non, je ne parle pas que des objets inutiles (le rembobineur de disque par exemple, ou le masseur de pieds…). Le consommateur, moi y compris, veut obtenir tout de suite la chose dont il a envie, sans la payer trop cher.

“Le Schmilblick est un objet rigoureusement intégral qui ne sert absolument à rien et peut donc servir à tout...” Pierre Dac


Par conséquent, les fabricants s’adaptent à cette demande absurde et énergivore, avec les conséquences que l’on sait sur l’environnement. Cette logique va à l’encontre des principes de réparation, de réutilisation et de recyclage. On nous promet un moyen d’éviter une tâche fastidieuse, d’apporter du confort, de simplifier nos existences. Pourquoi s’embêter ? Le monde du jetable est tellement plus simple à gérer, à court terme en tout cas. C’est pourquoi il serait urgent selon moi de ne plus acheter (inventaire à la Prévert) :
  1. la cigarette électronique jetable, même si je ne fume pas ;-)

  2. la ceinture ou le bracelet en faux cuir qui casse au bout de deux mois

  3. le meuble en bois semi jetable qui ne contient presque pas de bois (et finit à la poubelle au premier déménagement)

  4. les vêtements très bas de gamme qu’on associe à la fast-fashion

  5. les objets en plastique qui cassent facilement

« Car nous vivons dans un monde matériel,
Et moi, je suis une fille matérialiste. »
Madonna


Tous ces objets comblent un vide dans nos espaces de vie soi-disant trop grands. Mais justement, de la place, j’en manquais. J’ai fait du tri à la suite de mon arrivée dans un appartement qui ne possédait pas de cave. Parmi les possessions que j’ai conservées, il y a les objets que je n’ai jamais regretté d’avoir acheté. J’ai une tendresse particulière pour eux (merci de ne pas juger). Ils sont si peu nombreux que cela constitue une preuve de mon côté un peu (beaucoup) obsessionnel. Certains objets inanimés ont-ils une âme, pour paraphraser Lamartine ? Ces sept objets en ont une selon moi. Les voici, classés par date d’achat (ou date à laquelle on me l’a offert):


Le 06/07/2006 : un polo Lacoste



Avez-vous déjà été obligé de porter des t-shirts froissés ou des polos dont le col partait dans tous les sens ? Je me souviens aussi des faux polos Lacoste qui étaient vendus dans les années 80-90… avec un crocodile mal cousu. Bien sûr ils faisaient illusion les deux ou trois premières fois où on les portait. Mais l’original reste vraiment beaucoup plus confortable et solide, et résiste aux lavages. Le tissage « piqué » apporte du relief, de la solidité et bien sûr de la respiration.
Le col est fabriqué avec un tissu plus épais, et retombe toujours correctement. Bien sûr, la qualité a un prix, parfois trop important, mais pour une pièce qui reste pendant vingt ans dans une garde-robe, on peut se permettre un petit écart de budget.

Le 07/03/2008 : un couteau suisse



J’ai beau chercher, je ne vois pas une semaine sans que j’aie eu besoin au moins une fois de mon couteau suisse. Le couteau de l'armée suisse est parfait pour couper, visser, cureter, tailler, découper, épiler… j’en passe et des meilleures. Qu’emmèneriez-vous sur une île déserte ? Hé oui, exactement. Non, pas un briquet, pfff. Suivez, un peu.

Le 25/12/2008 : une écharpe Pétrusse



La marque française « Pétrusse » propose des tissus d’excellente qualité, fabriqués dans des matières nobles (soie, laine, lin, etc…). Pour ne rien gâcher, l’aspect esthétique est toujours très soigné. Je me souviens qu’ils vendaient de magnifiques masques en soie pendant la pandémie, fabriqués avec les chutes de tissus produites dans leurs ateliers.

J’apprécie surtout leurs écharpes, mais ils vendent aussi des étoles de très belle facture. On se transforme, le temps de les porter, en œuvre d’art vivante.

Le 30/07/2010 : une montre Casio W-212H



Qui porte encore une montre aujourd’hui ? Il suffit de regarder l’écran de son smartphone pour savoir l’heure. Mais souvent je n’ai besoin que d’une information : l’heure. Je ne souhaite pas connaitre les dernières nouvelles qui apparaissent sous forme de notifications et qui me déconcentrent. Donc une montre. Mais pourquoi pas une montre « connectée » ? Je me demande pourquoi je n’en possède pas (non). Peut-être est-ce en raison du coût$ ou bien de la nécessité de la recharger tous les jours ? Quelle marque de montre alors ? Casio est dans mon panthéon des marques incontournables. J’en suis tellement content, ne m’en veuillez pas si je leur fais de la publicité : « Achetez une montre Casio, n’importe laquelle ». C’est cadeau, vous pouvez garder le slogan si vous voulez. D’ailleurs j’ai choisi n’importe quelle montre de cette marque. J’ai changé la pile au bout de dix ans (10 ans !).
A part ça, tout va bien. Le bracelet n’a pas tenu la distance, et j’ai dû en changer pour un modèle en cuir. La précision de ce modèle n’est pas parfaite, elle avance d’une demi-seconde par jour. Mais si vous le souhaitez, d’autres modèles se calent sur le temps universel via un signal radio grâce à la technologie « waveceptor ». Sinon, elle continue à faire tout ce que je lui demande, donner l’heure, la date, s’illuminer quand j’appuie sur un bouton, me réveiller, lancer un compte à rebours pendant mes siestes, chronométrer mes courses à pied. Et si vous préférez les montres à aiguilles, ils en vendent aussi. Ah oui, si vous n’aimez pas changer la pile (10 ans je le rappelle), ils ont des modèles qui se rechargent à l’énergie solaire.

Le 08/04/2011 : un mug en porcelaine Hakuji de chez Muji



J’adore Muji. C’est une de mes marques préférées. J’achèterais sans doute tout le magasin s’ils n’avaient pas tendance à proposer des objets en plastiques totalement inutiles. Pour les meubles en bois et la vaisselle, allez-y les yeux fermés. La porcelaine Hakuji par exemple est d’une grande qualité. Elle vient d’une région du Japon qui produit de fort beaux objets. L’argile très pure avec laquelle elle est fabriquée la rend assez solide et douce au toucher. La simplicité des assiettes, bols, théières et tasses produites dans la province d’Arita est tout simplement charmante.
Le mug est particulièrement réussi selon moi. En effet, la poignée a le bon goût de ne pas appuyer sur les doigts en un seul point, puisqu’elle a une forme plate. Donc je ne me fais pas mal aux doigts quand je tiens cet objet, même quand il est rempli par de l’excellent thé vert Sencha.
Vous ai-je dis que la blancheur de la porcelaine prend progressivement la teinte du breuvage que vous aurez l’habitude d’y mettre ? C’est alors que cet objet vous appartiendra totalement.

Le 10/09/2011 : un pull en laine mérinos



Depuis les pulls de ma mamie qui me donnaient une envie irrésistible de me gratter la peau, jusqu’aux pulls en laine polaire qui électrisent les cheveux, je crois avoir essayé tous les types de mailles chaudes pour l’hiver. Il y a eu aussi pas mal de pulls en coton, un drôle de concept puisque ceux-ci ne vous protègent ni du froid, ni du chaud. Le pire reste quand même le pull-over en acrylique, dans lequel on transpire même quand il fait froid, et qui garde les odeurs. Restait la laine mérinos, que je ne connaissais pas. Je vais acheter un pull-over au magasin Célio du centre commercial de la Défense.
Je n’avais même pas remarqué dans quelle matière il était fabriqué. Je ne me rendais pas forcément compte des avantages que pouvaient avoir les matières naturelles sur les matières synthétiques. Et par conséquent, je me suis retrouvé surpris car j’ai mis ce pull presque tous les jours entre la fin de l’automne et le début de l’été. Pas parce qu’il était plus chaud que mes autres pulls, mais car il ne sent pas mauvais, et qu’il s’adaptait à l’environnement dans lequel je me trouvais. Je pouvais le porter plusieurs jours d’affilé sans avoir l’impression de dégager une désagréable odeur de transpiration. Les tâches non plus ne restent pas longtemps accrochée à la maille, un coup de brosse et elles partaient. Il m’arrivait parfois de le laver à 40 degrés en machine et de constater que la laine ne faisait pas de bouloches.
Mais j’ai arrêté de le faire, car je n’avais besoin de l’emmener au pressing qu’une fois par an pour l’entretenir. Évidemment, à force de porter la même chose tous les jours, j’ai fini par me lasser (et mon entourage aussi). Et le frottement de ma ceinture et des poignets sur mon bureau a fini par abimer la laine. A partir de là, j’ai vite cherché à remplacer tous mes pulls par des modèles en laine mérinos. Assurez-vous quand même que les moutons sur lesquels la laine aura été tondue ont été traités avec respect, c’est loin d’être toujours le cas.

Le 20/04/2015 : une râpe en acier Ikea



Vous avez déjà acheté du fromage râpé ? C’est beaucoup plus cher et ça se périme très vite. Quant aux carottes râpées vendues en sachet, n’en parlons pas, elles sont sèches et immangeables. Pour râper vous-même des aliments, quoi de mieux qu’une râpe qui se tient d’une main pour rester stable, et laisse l’autre libre ? Celle vendue 5€ par Ikea (Idealisk) est très pratique, ne s’use presque pas, et prend peu de place une fois rangée.
Alors oui, il vous faudra utiliser vos muscles. Et vous risquez de vous faire mal si vous approchez vos doigts trop près des lames. J’ai cassé plusieurs fois l’ongle de mon pouce droit quand je ne faisais pas attention. Une fois que vous maîtrisez le geste, vous ne pouvez plus vous en passer.

Le 01/11/2015 : un processeur Intel Core i7



Vous avez un ordinateur, mais vous ne savez pas comment il fonctionne. Alors voilà une petite explication. Il y a une petite puce électronique sur un circuit imprimé (la carte mère) qui fait tous les calculs, et presque sans se tromper en plus ! C’est le processeur. Oui, il y a des processeurs pour tous les goûts. En général, on ne fait pas trop attention à ce détail quand on achète un PC. On cherche le prix le plus bas, avec un Core i3 ou pire un Celeron ! Grossière erreur. Au bout de quelques mois d’utilisation, vous en aurez assez d’attendre que l’ordinateur s’allume, et vous retournerez sur votre smartphone pour faire vos déclarations d’impôts (honteusement). Donc pourquoi ne pas choisir un bon processeur dès le départ ? C’est ce que j’ai fait, et je n’ai absolument pas regretté. Le modèle que j’ai acheté d’occasion était un Core i7 2600K cadencé à 3.40 Ghz, conseillé par mon magazine préféré (Canard PC Hardware). Il était sorti plus de quatre ans avant que je ne me le procure, soit une éternité dans le monde des nouvelles technologies. La consommation électrique est maîtrisée, et la puissance est toujours là, sept ans après avoir installé la puce dans mon PC. Aujourd’hui, je choisirais sans doute un des modèles d’Apple. Ils consomment nettement moins d’énergie, ce qui n’est pas un luxe quand on voit combien de temps on laisse ce genre de machine allumée pour rien. Le M1 par exemple est un très bon processeur, dommage que le prix d’entrée pour un Mac soit si élevé…

« Une tourniquette
Pour faire la vinaigrette
Un bel aérateur
Pour bouffer les odeurs
Des draps qui chauffent
Un pistolet à gauffres
Un avion pour deux
Et nous serons heureux » Boris Vian, La complainte du progrès



La liste s’arrête ici, mais elle n’est pas exhaustive. S’il y a bien un objet dont je ne pourrais me passer, c’est d’un livre. Pas d’un seul livre bien sûr, mais de celui que je lis en ce moment par exemple. Car la matière peut être sublimée par l’être humain au point où celle-ci dépasse le statut d’objet pour devenir quelque chose d’un peu mystérieux. C’est le talent, le travail et la patience de l’artiste, de l’ingénieur ou de l’artisan qui permettent à ces objets de réaliser cette transition. Ils nous aident à rendre perceptible ce qui ne l’était pas, à repousser nos limites, à nous faire grandir.

« On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux » Antoine de Saint-Exupéry

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Article N°91
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Florent Thomas-Penette | Contactez-moi